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ENTRÉE EN VIGUEUR DE LA DIRECTIVE CSRD : QUELLES ÉVOLUTIONS RETENIR ?

La directive (UE) 2022/2464 Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD) du 14 décembre 2022 modifie de façon substantielle le reporting extra-financier. Quelles sont les évolutions introduites par la directive et comment les anticiper ? Réponses d’Hubert Segain et de Laurence Vincent, associés du cabinet Herbert Smith Freehills.

Quelles sont les grandes évolutions par rapport à l’actuel reporting extra-financier ?

Hubert Segain : En France, la loi NRE (2001) a introduit l’obligation de publier des informations extra-financières, obligation étendue à la déclaration de performance extra-financière (DPEF) lors de la transposition de la directive NFRD 2014/95/UE. La CSRD va plus loin, avec pour ambition d’harmoniser le rapport de durabilité des entreprises et permettre une meilleure comparabilité, disponibilité et qualité des données ESG publiées. Les sociétés concernées devront, en s’appuyant sur des normes européennes harmonisées (ESRS) définies par l’EFRAG, publier des informations précises et détaillées sur leurs risques, opportunités et impacts environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG), selon un principe de « double matérialité », et sur toute leur chaîne de valeur. Le principe de double matérialité va au-delà du principe de matérialité simple (matérialité financière relative aux impacts des facteurs de durabilité sur l’entreprise) consacré par les normes internationales de l’ISSB et prend également en compte les risques et les impacts de l’entreprise et de sa chaîne de valeur sur son environnement (matérialité d’impact). L’ACPR et la Banque de France soutiennent le projet d’adoption d’une table de concordance afin de faciliter l’interopérabilité entre les deux normes.

Quelles sont les sociétés concernées ?

Laurence Vincent : La CSRD étend considérablement le champ d’application et couvre l’ensemble des sociétés cotées (à l’exception des micro-entreprises), les grandes entreprises et les entreprises non-européennes remplissant certains critères. Une exemption est prévue pour les filiales si la société mère établit un rapport de durabilité consolidé.

Quelle est la date d’entrée en vigueur de la directive ?

H. S. : L’application de la CSRD sera progressive : à partir de 2024 pour les sociétés déjà soumises à la NFRD, de 2025 pour les autres grandes entreprises, de 2026 pour les PME cotées, et enfin à compter de 2028 pour les sociétés non-européennes. Les sociétés anticipent d’ores et déjà les nouvelles exigences face à la pression des parties prenantes et du régulateur.

La gouvernance ne faisait pas partie des informations de la DPEF. Quelle est la place du G de ESG dans la CSRD ?

L. V. : La gouvernance est centrale dans la CSRD et fait l’objet de normes spécifiques de l’EFRAG qui imposent de produire notamment des informations sur les systèmes de contrôle interne et de gestion des risques de l’entreprise, l’éthique des affaires et sa culture. La responsabilité des organes sociaux est élargie aux informations en matière de durabilité.

Selon les recommandations de l’AMF, le comité d’audit a, aux côtés du comité ESG, un rôle important quant à l’intégrité, le suivi et l’audit de l’information extra-financière. Quel pourrait être l’impact de la CSRD sur les opérations de M&A ?

H. S. : De l’opportunité de l’investissement à l’intégration post-acquisition, la prise en compte des facteurs ESG dans le processus M&A va s’accroître avec les nouvelles exigences introduites par la CSRD. Un enjeu clé est d’incorporer l’ESG dans le processus de due diligence.

Quelles recommandations donneriez-vous aux sociétés françaises afin d’anticiper les nouvelles exigences ?

L. V. : La CSRD va exiger des entreprises déjà soumises à l’obligation de publier une DPEF un effort plus important en termes de collecte, de consolidation des données, ainsi que des changements organisationnels. Cela implique également pour les sociétés de revoir leur stratégie des risques et impacts en association avec leurs parties prenantes. Pour les autres, il convient de faire rapidement un premier bilan interne, qui sera l’occasion d’identifier les risques et impacts de la société dans une approche de double matérialité. Il est nécessaire de définir et structurer une stratégie RSE, impulsée par des dirigeants formés à ces enjeux. Le gouvernement a mis en place la plateforme Impact afin d’aider les entreprises à anticiper ces évolutions.

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