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Groupe Crystal, 
au cœur 
de la consolidation 
du marché des CGP

En mai 2021, accompagné par Apax Partners, le groupe Crystal annonce l’entrée en négociations exclusives avec les associés du projet Victoire. L’objectif : créer le premier acteur français de la gestion de patrimoine et de la gestion privée. Depuis, le nouvel ensemble a mené une stratégie de croissance externe à marche rapide. Retour sur une véritable success-story française avec Benjamin Brochet, directeur général délégué du groupe Crystal et Jérôme Herbet, associé de Winston & Strawn.

Quelle est l’histoire de ce rapprochement ?

Benjamin Brochet : Le groupe Crystal a été fondé, en 1992, par Bruno Narchal (son actuel président, ndlr) et Yves Martin. À ses débuts, l’entreprise a eu vocation à accompagner les Français de l’étranger dans la gestion de leur patrimoine. En 2002, Jean-Maximilien Vancayezeele (son actuel directeur général, ndlr) a rejoint le groupe puis a commencé à mener avec Bruno une succession d’opérations de croissance externe afin de diversifier l’offre proposée. Le groupe a notamment acquis, en 2017, le réseau de gestion de patrimoine de l’assureur Generali, baptisé Expert & Finance. L’opération a été un succès et c’est sur cette base, qu’en avril 2021, l’équipe dirigeante a finalisé son premier LBO avec Apax Partners.

De mon côté, j’ai co-dirigé la stratégie du groupe Edmond de Rothschild durant six ans, après avoir exercé plusieurs années aux côtés de Robert Zolade (fondateur du groupe Elior, ndlr.) au sein d’Octant Partenaires, sa holding d’investissement. Nous avions investi 400 M€ dans les secteurs propices à la concentration de l’hôtellerie, de l’analyse médicale, de l’éducation et du camping – des domaines qui sont tous aujourd’hui sous les radars des fonds de LBO.

Lorsque le marché de la gestion de patrimoine a commencé à entrer en ébullition, j’ai choisi de me lancer dans un projet de consolidation. J’ai alors ciblé une dizaine d’entrepreneurs, dont Benoist Lombard qui dirigeait le cabinet Witam MFO et qui était l’une des figures de la profession en tant qu’ancien président de la CNCGP. Il était indéniablement le bon associé pour débuter un projet, appelé Victoire, en octobre 2020. Nous avons convaincu plusieurs de ses contacts de s’allier à nous : les cabinets Financière du Capitole/Axyalis, Groupe Venice, 3A Patrimoine, Cofige Patrimoine, le portefeuille de gestion privée de 123 Investment Managers et la société de gestion de portefeuilles Wiseam. Nous avons fédéré ce bloc avant de nous tourner vers le marché pour financer notre LBO.

Très vite, nous avons rencontré les représentants du groupe Crystal et d’Apax. Le coup de cœur a été immédiat, nous partagions les mêmes visions du métier et les mêmes ambitions. Notre rapprochement a été signé en mai 2021, nous permettant de profiter de leur organisation déjà très efficace, alors que nous n’étions pas encore réellement un groupe. Nous avons ensuite eu ensemble une grande motricité pour mener un projet très ambitieux de création du leader français du conseil en gestion de patrimoine.

Comment a été structurée l’opération ?

Jérôme Herbet : Le projet Victoire regroupait de sept entités qui avaient décidé de s’allier pour mener à bien un projet entrepreneurial commun, sans être formellement réunies par des liens capitalistiques. Ces entrepreneurs étaient fédérés par Benjamin Brochet autour d’une volonté commune manifeste. L’opération a été atypique puisqu’elle exigeait la signature de sept opérations simultanément, sur une même base, impliquant de se mettre d’accord en amont sur une documentation acceptable par tous, y compris des déclarations et garanties identiques. La nature des opérations était pourtant différente puisque, dans les sept entités, figurait une société de gestion de portefeuille soumise à agrément de l’AMF, ainsi qu’un fonds de commerce.

Benjamin Brochet : Le risque d’exécution de l’opération était important car l’ensemble des termes étaient négociés pour être réalisés sur la base de ces sept deals. J’étais accompagné à l’époque par un autre cabinet. Il a fallu deux à trois mois de négociations très intenses pour assurer un alignement d’intérêts et ne jamais être pris en défaut de loyauté. L’ensemble du succès de cette opération tient au fait d’emmener vers l’opération l’ensemble des parties simultanément.

Jérôme Herbet : La documentation était équilibrée pour toutes les parties prenantes et elle a d’ailleurs été reprise dans les 10 opérations menées par la suite par les équipes Crystal/Apax en 12 mois. Elle a permis aux associés suivants d’être rassurés sur le fait qu’ils signaient dans les mêmes conditions que les précédents.

Comment se sont passés les build-up suivants ?

Benjamin Brochet : Le cœur de notre agilité de build-up repose sur un processus juridique automatisé et fiabilisé. La documentation rédigée constitue un tronc commun dans lequel chacun peut se reconnaître. C’est une sécurité pour tout le monde car les 17 SPA sont très facilement consultables et analysables. Je salue à ce titre le travail mené par les équipes de Jérôme Herbet chez Winston & Strawn, qui représentaient Apax et le groupe Crystal à l’époque du projet Victoire et qui, aujourd’hui, continuent à accompagner le groupe dans toutes ses opérations de croissance externe. Elles ont tenu la plume et aidé à tenir un tronc commun de négociations dans chaque étape de notre développement.

Jérôme Herbet : Cette croissance externe rapide a été voulue et soutenue par le fonds Apax, qui les a financées. L’objectif était de rassembler, en un temps record, un grand nombre de professionnels à la réputation exceptionnelle, pour bouleverser le marché et s’imposer comme un acteur majeur du métier de CGP.

En quoi le secteur des CGP se prêtait bien au LBO et à la croissance externe qui s’en est suivie ?

Benjamin Brochet : Le métier de CGP est propice au LBO et à une démarche de consolidation, car les revenus y sont récurrents, le secteur est en forte croissance et les acteurs sont nombreux – 4 000 en France. Il est propice au build-up car deux tiers d’entre eux se sont installés dans les années 1990 et sont aujourd’hui confrontés à une problématique de transmission. Pendant longtemps les fonds d’investissement étaient réticents à s’engager dans le secteur des services financiers, qu’ils percevaient comme un bloc très régulé et donc compliqué. Dans les années 2010, ils ont commencé à apprivoiser ce secteur, d’abord en investissant dans le métier de courtage en IARD, puis dans celui de courtage en crédit. Ils sont désormais attirés par les CGP, comprenant qu’il existe une possibilité de faire émerger des acteurs leaders, sur le modèle de ceux qui existent au Royaume-Uni. Je rappelle à ce titre que le britannique Saint James’s Place gère aujourd’hui 150 mds£. Par comparaison, le groupe Crystal, qui est aujourd’hui un des leaders du marché français, conseille 6,8 mds€. L’exemple anglais démontre qu’il est possible de faire émerger des acteurs très spécialisés, portés par des professionnels qui y trouveront un parcours de carrière intéressant.

Jérôme Herbet : On pourrait faire un parallèle avec d’autres métiers régulés, comme le courtage d’assurance, qui ont également connu une phase de consolidation. Les fonds ne sont plus effrayés par ces métiers. J’ajoute que la particularité du projet de Crystal est de permettre aux entrepreneurs qui rejoignent le groupe, de rester associés à son succès. Ils entrent dans une logique d’association gagnante-gagnante.

Comment se répartit le capital du groupe Crystal aujourd’hui ?

Benjamin Brochet : Apax détient 55 % du capital du groupe, aux côtés des asset managers OFI et 123 Investment Managers qui détiennent 17 %. Les associés personnes physiques conservent 28 %, ce qui est une part importante. Le cercle des associés compte 72 personnes. Certaines d’entre elles n’étaient pas dans le capital à l’origine, mais ont souhaité investir dans le LBO pour leur permettre de posséder une partie de leur outil de travail. Nous utilisons le LBO pour donner l’opportunité aux meilleurs de nos managers de se créer un capital, leur assurant, tour de LBO après tour de LBO, de devenir des associés plus importants autour de la table. Ils doivent pouvoir bénéficier de l’effet de levier du LBO. Bruno Narchal a d’ailleurs toujours été dans cette logique de bienveillance dans la conduite de ses affaires. C’est une manière pour le groupe Crystal d’attirer et de fidéliser ses talents.

Parlez-vous déjà de sortie d’Apax ?

Benjamin Brochet : L’opération a 18 mois donc le sujet n’est pas sur la table et le cycle de LBO va se poursuivre. Nous sommes en dialogue permanent avec nos actionnaires, qui nous font confiance et nous soutiennent dans cette stratégie, mélangeant croissance externe rapide et forte croissance organique.

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