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Orpea : la Silver économie sans frontières

Par Houda El Boudrari
Les chiffres clés

3,42 Mds€ de chiffre d’affaires en 2018 (+9%).

65% des lits à l’international.

96 557 lits répartis sur 950 établissements.

Orpea a constitué en 30 ans un des leaders mondiaux de la prise en charge de la dépendance en exportant le modèle de l’Ehpad à la française aux quatre coins du monde, de la Chine au Brésil en passant par Moscou où il vient de planter un premier drapeau cette année.


La course à la taille entre les deux géants français de la dépendance Orpea et Korian se fait depuis quelques années sur le terrain international. Mais avec des stratégies très différentes. Si Korian a pris le parti de la proximité et du tropisme européen dans son expansion, son ancien challenger qui l’a détrôné sur la première marche du podium européen avec ses 3,4 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2018, a lui, semé ses pions aux quatre coins de la planète. Car le vieillissement de la population est bien un phénomène mondial qui va encore s’accélérer dans les prochaines années. C’est notamment la partie des plus de 80 ans qui va exploser avec une progression de + 230 % d’ici à 2050, soit une hausse de 290 millions de personnes. Ces perspectives sont d’autant plus inquiétantes que beaucoup de pays sont encore complètement démunis face à l’ampleur du phénomène et la culture de la prise en charge de la dépendance par des structures professionnelles est loin d’avoir essaimé dans toutes les contrées.


Cavalier seul en Chine. Et tant qu’à s’intéresser à ce gisement mondial de croissance, autant s’attaquer au pays le plus peuplé au monde, la Chine, où Orpea a ouvert un premier Ehpad dès 2016. Car avec les conséquences de sa politique de l’enfant unique, l’ancien empire du Milieu est confronté à un besoin criant de structures de prise en charge de ses seniors, qui vont représenter 18 % de l’ensemble de sa population en 2030. Cette évolution du marché de la dépendance laisse un champ immense aux opérateurs capables d’intégrer toutes les contraintes réglementaires. À la différence de son compatriote de taille plus modeste Colisée qui s’est allié fin 2014 à un groupe local pour pénétrer le marché des Ehpad chinois, Orpea a choisi de faire cavalier seul en ouvrant un premier établissement à Nankin détenu à 100 %, une sorte de projet pilote avec une qualité hôtelière cinq étoiles et une vraie prise en charge de la grande dépendance. Ce positionnement premium est d’ailleurs celui adopté par Orpea dans l’ensemble de sa stratégie internationale, y compris en Europe, et qui lui permet de financer son expansionnisme sans sacrifier sa rentabilité, comme le soulignait son directeur général Yves Le Masne à la publication des résultats fin mars : « Le développement international du groupe a été très dynamique en 2018 avec 10 000 lits supplémentaires sur l’ensemble du réseau en 12 mois, et le renforcement du positionnement sur le segment premium, notamment en Allemagne. En parallèle, la rentabilité a progressé, avec une hausse de plus de 11 % du résultat net qui a doublé en 5 ans. » Ainsi en 2018, l’Ebitdar (l’Ebitda courant avant loyers) du groupe progresse également de +7,8 % à 911,8 millions d’euros, démontrant la capacité de l’opérateur à déployer ses leviers opérationnels, y compris dans les zones d’implantation récente.



Cinq clusters couvrant 35 pays. En 2018, Orpea a remis à plat l’organisation du groupe en structurant cinq clusters géographiques : France Benelux, Europe centrale (regroupant Allemagne, Suisse et Italie), Europe de l’Est (Autriche et pays d’Europe de l’Est), Péninsule Ibérique Latam (regroupant Espagne, Portugal et les pays d’Amérique latine) et enfin la Chine. Ainsi, le groupe est passé d’une organisation par pays à une organisation en clusters, entités organisationnelles avec une équipe de management et un siège, gérant plusieurs pays. L’objectif est désormais de se développer dans 35 pays représentant 34 millions de personnes de 80 ans et plus, soit une progression du potentiel de 70 % par rapport à l’organisation précédente. D’ici à 2030, dans les quatre clusters d’implantation d’Orpea (hors Chine), selon les estimations de chaque pays, c’est 1,6 million de lits qu’il va falloir construire. « Fort d’une nouvelle organisation en clusters, Orpea est dans une position unique, bénéficiant d’un potentiel de développement et de création de valeur inégalé, commente Yves Le Masne. 2019 est l’année où Orpea concrétise une nouvelle ambition stratégique et devient le leader du continent Amérique latine avec des prises de participation dans les premiers groupes chilien et brésilien, accompagné de partenaires de premier plan lui permettant de sécuriser un développement très dynamique dans cette région à fort potentiel ». En mars, Orpea annonçait en effet avoir bouclé l’achat de 50 % de Senior Suites, le premier groupe chilien de maisons de retraite, et de 20 % de Brasil Senior Living, acteur brésilien officiant dans les maisons de retraite, les cliniques de soins de suite et les soins à domicile. L’opérateur de maisons de retraites s’est également implanté en Uruguay, avec l’acquisition d’un établissement haut de gamme.



La Russie en ligne de mire. Pour autant, le groupe créé en 1989 par Jean-Claude Marian, qui en a quitté la présidence en 2017, continue à mener des offensives régulières pour accroître ses parts de marché en Europe. Il a mené tambour battant cinq acquisitions aux Pays-Bas en quelques mois et détient désormais une part de 10 % du marché des résidences médicalisées. Ainsi, en 10 ans, Orpea est passé d’une implantation dans quatre pays dont 80 % de son réseau en France à 14 pays dont 65 % de son réseau hors de France. Dernier terrain de conquête en ligne de mire : la vaste Russie ! En 2018, Orpea avait signé, lors du Forum Economique International de Saint-Pétersbourg, plusieurs accords de coopération, en présence des présidents Poutine et Macron, pour développer des établissements de santé en Russie. Et en avril dernier, le géant européen s’entoure de chaperons institutionnels en concluant un partenariat opérationnel avec Bpifrance et RDIF (fonds souverain russe) pour créer, en Russie, des établissements de Soins de Suite et de Réadaptation (SSR). Dans le cadre de cet accord, un premier projet a été signé avec le gouvernement et la mairie de Moscou, prévoyant la création d’une clinique SSR dans l’International Médical Cluster de Moscou, dont l’ouverture est programmée en 2022. Un premier jalon pour Orpea qui devrait baliser le chemin de son implantation dans une zone encore très peu peuplée de maisons de retraite.

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