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BABYMOOV S’ÉMANCIPE DE SON TRIO FONDATEUR

Créé il y a 25 ans par trois jeunes étudiants, le leader français de la petite puériculture est transmis en LBO à un triumvirat de jeunes managers adossé au fonds Tomorrow, qui veut accélérer la transformation de la PME auvergnate vers plus de durabilité.

C’EST UNE ENTREPRISE QUI RÉUNIT TOUS LES INGRÉDIENTS DE LA SUCCESS STORY À L’AMÉRICAINE : trois jeunes étudiants liés par une amitié indéfectible créent une start-up innovante sur le marché difficile de la petite puériculture, la hissent au rang de leader français et l’internationalisent, puis, 25 ans plus tard, passent le flambeau à un trio de collaborateurs issus de leurs rangs et vont couler une épanouissante retraite à l’aube de leurs 50 ans… Certes, Babymoov n’est pas né sur le campus de Harvard mais dans l’amphi de l’ESC Clermont-Ferrand et le numéro un tricolore de la petite puériculture plafonne à une soixantaine de millions d’euros de revenus, loin des champions mondiaux du secteur. N’empêche que la pépite auvergnate incarnait le parfait candidat pour inaugurer le portefeuille du nouveau fonds midcap d’Initiative & Finance, Tomorrow, lancé début 2021. Alors qu’il venait de signer son premier closing à plus de la moitié de son objectif de levée de 350 M€, le véhicule positionné sur l’accompagnement des transitions environnementales des PME et ETI s’est adjugé en février 2022 la majorité du capital de Babymoov, mobilisant un ticket d’equity dans le milieu de sa fourchette d’intervention, de 20 à 50 M€. Crédit Mutuel Equity, qui détenait 20 % du capital depuis 2011, a signé sa sortie à cette occasion tandis qu’Arkéa Capital l’a remplacé comme nouvel investisseur minoritaire de l’entreprise aux 61 M€ de revenus.

Une transmission atypique

Le trio fondateur, Arnaud Thiollier, Laurent Windenberger et Arnaud Courdesses, réinvestit à hauteur de 20 % du capital et prend du champ de l’opérationnel en confiant les manettes à un nouveau triumvirat de managers formé par le directeur du développement international Pierre Magro qui devient président, la CFO Sandrine Monestier, promue directrice générale ressources et finances, et la chef de marque Celia Grignon devenue directrice générale innovation & marketing. Ces derniers font leur première entrée au capital à cette occasion. « C’est une transmission qui a été très intelligemment préparée, assure Caroline Pihan, associée de l’activité midcap d’Initiative & Finance. Les fondateurs ont su laisser pleinement la place à leurs successeurs tout en les accompagnant sur les sujets stratégiques au sein du conseil de surveillance », poursuit l’investisseuse. « Le trio que je forme avec Célia et Sandrine est de nature différente de celui des fondateurs, dont la complicité amicale date de leurs 20 ans, mais nous avons la même complémentarité fonctionnelle », confie de son côté le nouveau président Pierre Magro. Issu des rangs de l’ESC Clermont où Babymoov incarne le business case emblématique, il y postule pour un stage en 2005 et finit par y rester et gravir tous les échelons. Le pur produit maison se félicite également que ses deux codirigeantes apportent leur expérience dans des organisations plus importantes afin de fertiliser la croissance de la PME. Ainsi, la directrice générale innovation & marketing, Célia Grignon, a fait ses premières armes chez Seb puis est passée par Smoby avant de rejoindre Babymoov en 2016 au poste de chef de produit ; tandis que la directrice générale ressources & finances, Sandrine Monestier, a cultivé sa vocation au sein de la direction financière du groupe coopératif clermontois Limagrain, avant de devenir la CFO de Babymoov en 2018.

Crise de croissance en 2017

Sur un marché de la puériculture très concurrentiel et confronté à la baisse de la natalité, l’ancienne start-up bénéficie d’une forte notoriété grâce à ses produits innovants en petite et moyenne puériculture sous ses deux marques Babymoov, et Badabulle. Dans le top trois du marché français sur le segment des babyphones, des robots culinaires ou autres balancelles, au coude à coude avec le français Béaba et l’italien Chicco, l’entreprise auvergnate s’est lancée dans une stratégie d’internationalisation dès les années 2015 pour booster sa croissance face à un marché domestique atone. En créant coup sur coup des filiales en Allemagne, au Bénelux, en Espagne, au UK et en partant à la conquête du vaste marché américain, le petit poucet clermontois a même failli mettre en péril son existence quand ces investissements coûteux ont tardé à porter leurs fruits. « L’erreur que nous avons commise a été de vouloir financer une stratégie d’internationalisation ambitieuse sur nos propres fonds propres », retrace Pierre Magro, qui a éprouvé sa propre résilience et celle de l’équipe pendant deux années difficiles où l’entreprise a dû se mettre sous mandat ad hoc et solliciter son actionnaire minoritaire Credit Mutuel Equity pour remettre au pot. Cette crise de croissance est aussi l’occasion pour Babymoov de revoir sa stratégie marketing sans renoncer à l’innovation dont le budget a été maintenu autour de 2 M€ par an, y compris pendant la période de vaches maigres. L’entreprise planche ainsi sur la rationalisation de son portefeuille en se focalisant sur ses best-sellers qu’elle pousse à l’international en fonction des modes de consommation spécifiques de chaque marché, et retrouve l’équilibre dès l’exercice 2018. Il faut dire qu’avec son modèle « fabless », le spécialiste de la puériculture dispose d’une agilité qui accentue sa capacité de rebond.

Pionnier de l’économie circulaire

Une fois passé ce crash-test, Babymoov a embrayé sur une croissance à deux chiffres depuis 2018 et traversé la crise sanitaire sans encombre, passant de 49 M€ de chiffre d’affaires en 2019 à 55 M€ en 2020 et 61 M€ l’an dernier, dont la moitié à l’international, porté par le marché américain devenu le premier pourvoyeur de croissance hors de France. Entretemps, l’entreprise a embrassé à bras-le-corps le sujet de la durabilité dans une filière où les enjeux d’éco-conception, de sourcing et de fin de vie des produits ne sont pas des plus simples à aborder. « En 2019, nous avons commencé à réfléchir à la formalisation de notre engagement pour lancer officiellement le mouvement GreenMoov en janvier 2020, témoigne Pierre Magro. Cela implique la mise en oeuvre d’une stratégie ESG 360° qui a du sens et englobe toute notre chaîne de valeur – de la gouvernance à la réparabilité de nos produits en passant par le sourcing des matériaux qui les composent ». Concrètement, Babymoov a d’abord commencé par garantir ses produits sans limite de durée, en mettant à disposition de ses clients des pièces détachées pour encourager la réparation plutôt que le remplacement du produit. « Nous avons aussi mis en place une activité de réparation et de reconditionnement dans notre atelier de Clermont-Ferrand qui nous permet déjà d’économiser 10 tonnes de déchets chaque année. Les produits reconditionnés sont ensuite revendus sur notre site internet avec une réduction par rapport au prix neuf et assortis d’une garantie de 12 mois », poursuit le président de Babymoov. Des initiatives d’économie circulaire rares, voire encore inexistantes dans le secteur de la petite puériculture où le marché de la seconde main est quasi totalement accaparé par des sites comme Vinted et Leboncoin. L’engagement précoce de Babymoov dans la transition environnementale a d’ailleurs été un critère de choix majeur pour Tomorrow, premier fonds français midmarket classé article 9 de la réglementation SFDR, ou « sustainable finance disclosure regulation », soit le niveau le plus exigeant de la nomenclature européenne en termes d’engagement dans le développement durable des sociétés de gestion et de leurs participations. Depuis le LBO début 2022, Initiative & Finance a ainsi mis à disposition de Babymoov son operating partner expert des sujets de durabilité, François-Xavier Oliveau. « Il nous a beaucoup aidés dans l’analyse du cycle de vie global de nos produits et dans la hiérarchisation des actions à mener pour réduire notre empreinte carbone », assure Pierre Magro, qui compte aussi sur son actionnaire financier pour l’accompagner dans l’étude d’acquisitions ciblées pour diversifier son portefeuille produits et accélérer son internationalisation. Un nouveau terrain de jeu encore inexpérimenté pour la PME qui a connu 25 ans de croissance organique.

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